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Revue de Management et de Stratégie
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Entretien avec Eric Jacquemet, président du groupe Sarbec Cosmetics

La saga d'une ETI française




La Rédaction


Dans un contexte de crise, tous les regards sont désormais tournés vers les entreprises de taille intermédiaire (ETI). Un regain d’intérêt justifié quand on sait que ces dernières forment un tissu économique dynamique et des emplois solidement ancrés en France. De quoi proclamer « medium is beautiful ? » La success story de Sarbec Cosmetics en est bien la preuve, comme nous l’a confié son président Eric Jacquemet. Ancien président de la filiale de TNT France, ce manager a pris les rênes de l’entreprise familiale qui connaît une croissance ininterrompue. Eric Jacquemet nous éclaire sur sa stratégie qu’il élabore avec passion. Rencontre.



Eric Jacquemet, président du groupe Sarbec Cosmetics
Eric Jacquemet, président du groupe Sarbec Cosmetics

Vous dirigez le 1er groupe familial français indépendant de cosmétiques et de parfumerie. Pouvez-vous retracer la genèse de Sarbec Cosmetics ?

Depuis 3 générations, Sarbec Cosmetics conçoit, fabrique et commercialise des produits cosmétiques et des parfums. Tout a démarré en 1969 sous l’égide de Paul Duprez, le fondateur du groupe qui s’associe avec un pharmacien homéopathe afin de concevoir des produits naturels. Ensemble, ils imaginent une femme à la beauté fraîche et naturelle : Corine de Farme est née. Ces produits sont alors vendus en pharmacie, jusqu’à ce que le gendre du fondateur, Patrick Van den Schrieck reprenne l’entreprise. C’est lui qui a l’idée de vendre ces produits dans les circuits de grande distribution afin d’en permettre l’accès à une clientèle plus large.
 
Paul Duprez a impulsé une ligne directrice très forte pour notre groupe : la cosmétique est le cœur de métier de Sarbec Cosmetics depuis plus de 40 ans. L'entreprise s’est depuis développée autour de ce savoir-faire que nous avons décliné dans la parfumerie, secteur complémentaire. Notre expertise nous permet également de fabriquer des produits de cosmétique et des parfums pour des distributeurs et que nous ne pouvons pas citer. C’est en maintenant ce cap que nous sommes devenus le 1er groupe familial français indépendant en cosmétiques ainsi qu’en parfumerie.

Outre Corine de Farme, vous possédez plusieurs marques. Comment garantir l’identité de chacune au sein du groupe ?

En effet, nous possédons 4 marques et licences présentes dans plus de 115 pays. Corine de Farme est notre marque emblématique. Côté parfums, Sarbec Cosmetics s’illustre grâce à Inessance Paris et Jacomo. Nous possédons également des licences comme Disney Marvel et Star Wars qui s’inscrivent totalement dans l’identité de nos marques ainsi que celle de Brumisateur Evian.  Il me paraît important pour une entreprise de bien circonscrire l’identité de chacune de ses marques.  

Aussi chaque marque ou licence de Sarbec Cosmetics évolue sur un territoire propre, et est distribuée via un circuit de distribution bien défini. Par exemple, Corine de Farme se positionne sur la cosmétique naturelle des peaux sensibles. Inessance Paris, crée des parfums de haute qualité et exclusivement vendus en grande distribution. Ce mode de distribution permet de distinguer Inessance Paris de Jacomo qui est une marque de parfumerie de luxe, vendue dans le circuit sélectif, principalement en Amérique du Sud, en Afrique et aux Etats-Unis. Chacune porte l’un des savoir-faire de Sarbec Cosmetics et sont complémentaires, comme le montre le Brumisateur Evian que nous distribuons à travers le monde et qui vient compléter les gestes soin et beauté au quotidien. 

Face aux impératifs de développement, comment concilier croissance interne et acquisitions ?

Chaque entreprise doit trouver son équilibre. Il n’y a pas, selon moi, une stratégie meilleure que l’autre : elles se complètent bien et permettent ensemble à l’entreprise d’être plus solide. La croissance externe permet de prendre rapidement une position sur un marché nouveau. C’est ce que nous avons constaté avec l'acquisition stratégique de Jacomo en 1995. Je crois également beaucoup à la vertu de l’effort et au développement avec les équipes, qui contribuent à la croissance organique de l’entreprise. La croissance repose aussi bien sur la force des équipes et la qualité du management que sur les activités de conception/production B to B.
 
De plus, il est important selon moi de préserver le savoir-faire initial pour l’adapter aux nouveaux modes de consommation, mais également aux défis d’une économie globalisée que les entreprises doivent aujourd’hui relever. Aussi, les investissements dans les unités de production sont primordiaux pour un acteur de la cosmétique comme Sarbec Cosmetics. 

Est-ce à dire que la R&D est une des clefs de la réussite pour une ETI ?

C’est évident ! L’innovation fait partie de l’ADN d’une ETI. Elles sont souvent les premières à proposer des produits sur le marché. Cela est particulièrement incontournable dans la cosmétique où les consommateurs, femmes comme hommes, sont à la recherche de produits innovants, que ce soit dans les textures ou dans les formules. Le secteur est d’ailleurs un formidable terrain d’innovation : hydratation, lutte antivieillissement pour le visage et le corps, les opportunités sont multiples. C’est également le cas dans la parfumerie où les associations sont illimitées afin de répondre aux envies des consommateurs qui évoluent rapidement. Et ces derniers sont toujours plus sensibles à la nouveauté. Ainsi, pour une ETI, un des moyens de se démarquer de ses concurrents est d’investir le champ de la R&D.

La R&D est particulièrement indispensable pour des acteurs comme Sarbec Cosmetics qui ont la volonté de développer des formules contenant le moins de conservateurs possible. Ainsi, nous investissons près de 4% du chiffre d’affaires en R&D chaque année. Notre laboratoire est dirigé par un docteur en pharmacie qui orchestre les savoir-faire de nos chercheurs et formulateurs, afin de développer les nouveaux produits que nous commercialiserons en propre ou pour les marques avec lesquelles nous travaillons. Notre laboratoire nous permet ainsi de proposer des formules innovantes clefs en main et de répondre aux exigences des marques pour lesquelles nous concevons des produits. 

Face à la concurrence, la certification est-elle un atout pour les ETI ?

La certification est plus qu’un atout, c’est aujourd’hui un prérequis pour les entreprises, toutes tailles confondues. Cela est d’autant plus évident pour des acteurs comme nous, qui évoluons dans le domaine pharmaceutique avec des forts enjeux sanitaires. Ainsi, la certification nous permet de formaliser notre politique qualité présente depuis la création du groupe. Par exemple, nous avons toujours œuvré afin de limiter les conservateurs dans nos formules. Ce point de départ a su initier un cercle vertueux, car nos engagements induisent des usines très performantes dans lesquelles nous sommes à même de fabriquer et conditionner des produits en atmosphère protectrice. Ainsi nos sites de production sont certifiés ISO 9001.

Et aujourd’hui, l’éventail de certification est suffisamment étoffé pour que chaque entreprise puisse trouver la certification qui lui correspond : selon la nature des produits que nous fabriquons, nous répondons aux exigences de la norme ISO 22716 relative aux Bonnes Pratiques de Fabrication des produits cosmétiques ou aux exigences de la norme NF EN ISO 13485 spécifique aux dispositifs médicaux. C’est un atout, tant vis-à-vis de nos clients que de nos partenaires commerciaux, qui ont des standards de qualité élevés. Il s’agit donc de répondre aux exigences sanitaires, mais également aux enjeux de bonne gouvernance, qui sont selon moi incontournables pour les entreprises, ETI comprises. 

Près de la moitié de votre chiffre d’affaires est réalisée à l’international. Quelle a été votre stratégie afin de conquérir de nouveaux marchés ?

Cette stratégie internationale a été assez naturelle. Elle tient du savoir-faire de Sarbec Cosmetics dans la conception et production de cosmétiques et de parfums : pourquoi ne pas le partager avec un public international ? Ces derniers sont d’ailleurs friands de produits made in France et le marché est en plein essor. En tant que dirigeant d’une ETI, il me semble important ne pas exclure la possibilité d’exporter un savoir-faire à l’étranger. D’autant que la flexibilité et la réactivité propres aux ETI sont déterminantes pour la conquête de nouveaux marchés.
 
En outre, la France jouit d’une image très positive à l’étranger et est reconnue dans le secteur de la cosmétique et de la parfumerie. Nous sommes donc fiers de pouvoir nous y inscrire en tant qu’ambassadeur de la « beauté et du soin à la française ». Nos marques sont présentes dans plus de 115 pays à travers le monde et près de 50% du CA sont réalisés hors France. Enfin, j’ajouterai que cette stratégie ne s’est pas développée sans une bonne dose de courage et de culot inhérente à notre culture d’entreprise.

La réussite de SARBEC doit-elle également au mode de gouvernance familiale ?

Oui en effet. Force est de constater que pour Sarbec Cosmetics, l’ADN 100% familial garantit le cap que nous nous fixons. C’est l’une des raisons de la pérennité et de la croissance constante du groupe depuis plus de 40 ans. Il est clair que cela nous permet d’avoir une stratégie sur le  long terme. De plus, nous sommes totalement indépendants dans les choix stratégiques de développement. Je représente la 3ème génération et m’évertue à perpétuer les valeurs et l’identité de l’entreprise.

Votre nom apparaît dans la liste des membres du conseil de surveillance de Geodis. Quel est le lien avec vos responsabilités au sein de Sarbec Cosmetics ?

En effet, je suis membre du conseil de Géodis et très fier de participer à la gouvernance de cette grande entreprise française. La logistique est une composante essentielle pour une ETI qui évolue sur le marché de l'industrie et qui possède des clients dans plus de 120 pays. Le lien tient donc dans la valeur ajoutée que la logistique apporte aux 110 millions de produits que nous vendons chaque année.